Dans un projet de décret venant d'être publié, le ministère de l'écologie a glissé une disposition qui permet de détruire tous les ouvrages par une procédure de simple déclaration et non plus d'autorisation. La différence? Il n'y aurait aucune information des citoyens, aucune enquête publique, aucune possibilité de déposer recours gracieux ou contentieux contre des arrêtés préfectoraux. Face aux nombreuses protestations que suscitent les travaux de continuité, on organise ainsi l'exécution ordinaire de l'arbitraire administratif. Et on s'apprête à massacrer les rivières, plans d'eau, canaux sans même faire d'étude d'impact de leur faune et de leur flore, d'analyse des effets sur les niveaux d'eau, d'évaluation de l'avenir en crue ou en étiage. La protection des droits des tiers et du vivant en place serait réduite au strict minimum pendant que les pelleteuses détruisent des milieux souvent présents depuis plusieurs siècles. Nous appelons tous les acteurs à mesurer la gravité de cette disposition et à s'y opposer, déjà en déposant un avis négatif en consultation publique, ensuite en préparant un recours collectif. Nous appelons également les participants des discussions au comité national de l'eau à tirer les conclusions qu'impose cette nouvelle provocation de la direction de l'eau et de la biodiversité.
Le gouvernement vient de déposer en consultation publique un projet de décret de modification du régime IOTA (installations, ouvrages et travaux en rivière).
Ce projet comporte cette disposition assez discrète, placée dans son article 5 :
9° Après la rubrique 3.3.4.0. est créée une rubrique 3.3.5.0. ainsi rédigée :« 3.3.5.0. Travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques, y compris les ouvrages nécessaires à cet objectif, définis par un arrêté du ministre en charge de l'environnement. (D)Cette rubrique est exclusive de l'application des autres rubriques de la présente nomenclature.Au nom d'une catégorie fourre-tout de "restauration des fonctionnalités naturelles", il serait désormais possible d'intervenir par une simple déclaration en préfecture, cela sans égard pour les impacts créés par le chantier de restauration.
Concrètement cela peut signifier : détruire des moulins, étangs et plans d'eau, assécher des biefs et canaux, sur la base d'une simple déclaration, sans avoir à se référer aux règles prudentielles des autres rubriques du régime IOTA.
Le projet d'arrêté ministériel précise ainsi les travaux concernés :
"À cet effet, un projet d’arrêté définissant les travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques relevant de la rubrique 3.3.5.0. de la nomenclature annexée à l’article R. 214-1 du code de l’environnement a été rédigé. Il liste les travaux suivants :
- arasement ou dérasement d’ouvrage en lit mineur ;
- désendiguement ;
- déplacement du lit mineur pour améliorer la fonctionnalité du cours d’eau ou rétablissement du cours d’eau dans son lit d’origine ;
- restauration de zones humides ;
- mise en dérivation ou suppression d’étangs existants ;
- remodelage fonctionnel ou revégétalisation de berges ;
- reméandrage ou remodelage hydromorphologique ;
- recharge sédimentaire du lit mineur ;
- remise à ciel ouvert de cours d’eau couverts ;
- restauration de zones naturelles d’expansion des crues.
- opération de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques prévue dans des documents de gestion approuvés par l’autorité administrative (cf liste dans l’arrêté)."
Auparavant, dès lors que 100 mètres de profil en long ou en travers d'une masse d'eau étaient modifiés, l'autorisation s'imposait. Et pour cause, un projet qui modifie considérablement le milieu en place doit obéir à un principe de précaution tant vis-à-vis du vivant tel qu'il existe sur le site que vis-à-vis des riverains.
Cette règle d'autorisation a permis à notre association de sauver divers sites dont l'administration voulait tolérer la destruction sans s'encombrer des obligations de l'autorisation (mais cette administration a dû reculer après recours). Cela a surtout évité des destructions sans réflexion ni préparation sérieuses, car l'autorisation est une procédure assez exigeante et les syndicats (ou autres maîtres d'ouvrage) sont donc tenus à une certaine rigueur sur les chantiers de continuité.
La fin de ce régime d'autorisation sous prétexte de "restauration de fonctionnalités naturelles" signifierait ainsi pour les collectifs et associations impliqués sur la continuité écologique et pour les citoyens en général :
- quasi-impossibilité d'être informés des projets (la déclaration est un simple courrier sans publicité à la DDT-M),
- absence d'étude des impacts riverains / usages / environnement,
- fin de l'enquête publique qui permettait aux citoyens de s'exprimer (en général, contre les casses) et aux associations de préparer des recours contentieux éventuels contre l'arrêté d'autorisation
- possibilité de casser "à la chaîne" pour les maîtres d'ouvrage de type syndicats de rivière ou fédérations de pêche.
Nous appelons les associations, fédérations et syndicats à faire de même, à donner leur avis dans la consultation, à préparer si nécessaire une action collective en justice.
Déposez votre avis sur la consultation.
Nota : nous écrire si votre association est disposée à participer à un contentieux.
Les représentants nationaux des ouvrages
doivent prendre leur responsabilité!
Suite aux déclarations du ministre Rugy, à la mauvaise volonté de produire la moindre avancée en comité national de l'eau, à ce nouveau décret scélérat, les fédérations moulins-riverains-étangs et syndicats doivent tirer les conclusions qui s'imposent. L'heure n'est plus à la division, l'heure n'est plus au pinaillage de textes abscons proposés par des fonctionnaires manipulateurs: l'heure est à la lutte coordonnée, résolue, systématique, sur tous les terrains pour sauver les ouvrages dont l'administration poursuit manifestement la disparition planifiée. Nous demandons en conséquence aux fédérations d'examiner l'opportunité de poursuivre leur participation du comité national de l'eau, mais surtout d'exposer de manière unitaire aux parlementaires et aux médias la situation catastrophique des patrimoines des rivières et les manoeuvres insincères de l'administration en charge de l'eau. Le comité national de l'eau a eu pour effet concret de neutraliser la dynamique créée par les nombreux rapports critiques de la continuité de la période 2012-2017, d'endormir les élus en prétendant que la concertation était en train de régler les problèmes, de laisser du temps à une bureaucratie déstabilisée pour organiser sa riposte, poursuivre son idéologie et aggraver sa dérive antidémocratique. doivent prendre leur responsabilité!
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