Les hauts fonctionnaires du ministère de l'écologie appellent à des mesures de compensation pour tout chantier affectant les milieux aquatiques et humides, en particulier le linéaire en eau, ses berges, la capacité productive du milieu. Problème : les mêmes fonctionnaires exigent une application dogmatique de la continuité écologique avec préférence à l'effacement qui, dans de nombreux cas, amène à assécher des centaines de mètres de biefs et zones humides annexes, à faire crever la végétation riveraine, à diminuer la productivité biologique de plans d'eau et à réduire la capacité d'accueil de la biodiversité locale. Il faut donc désormais rappeler aux préfets et aux établissements porteurs de projets d'effacement ce qu'exige le ministère: la disparition d'un milieu en eau doit être évitée sinon compensée.
La direction de l'eau et de la biodiversité a participé en 2017 à un colloque sur les mesures compensatoires quand un environnement aquatique ou humide est altéré par un chantier (Dimensionnement de la compensation écologique des cours d’eau, Bron, septembre 2017). Les hauts fonctionnaires ont exprimé leur "doctrine".
Voici deux diapositives intéressantes où les hauts fonctionnaires exposent certains points à la vigilance des préfets.
Le problème : ces mêmes hauts fonctionnaires ont donné la préférence à la destruction systématique des ouvrages d'hydraulique ancienne au nom de la continuité écologique, cela pour divers motifs (parfois une stratégie sincère pour améliorer la situation de grands migrateurs comme le saumon ou l'anguille; plus souvent la soumission au lobby des pêcheurs de salmonidés et à des ONG minoritaires défendant une vision radicale de la conservation, ainsi que la démission de la puissance publique faute de moyens, avec volonté de se débarrasser d'ouvrages dont il faut assumer le suivi réglementaire).
Or cette politique de destruction des ouvrages, biefs, canaux et plans d'eau a de nombreux effets négatifs sur l'environnement local, au regard même des différents motifs de compensation écologique que le ministère reconnait et rappelle aux préfets. Il est en effet courant que les opérations de destructions d'ouvrages fassent disparaître des centaines voire des milliers de mètres d'annexes latérales en eau (bief) et de leurs abords humides, particulièrement en tête de bassin où des milliers d'ouvrages anciens (étangs, moulins) sont concernés.
Exemple des conséquences de destructions d'ouvrages en lit mineur : la rivière se trouve réduite à un chenal unique car tout le réseau latéral des biefs et zones humides alimentés par ces biefs sera à sec à terme. De tels chantiers font perdre du linéaire d'écoulement et de berge, donc de la productivité et de la diversité biologiques pour les milieux aquatiques et humides. En tête de bassin, ces chantiers ne sont généralement réputés favorables à la biodiversité qu'en raison de la focalisation sur certaines espèces halieutiques comme la truite, intéressant en réalité des usagers de la rivière (lobbying des pêcheurs et de leurs fédérations).
Les chantiers de destruction d'ouvrages hydrauliques, lorsqu'ils concernent des étangs ou des chaussées / barrages produisant des biefs d'intérêt avec des berges boisées, ont donc des impacts qu'il conviendrait de compenser, si l'on reprend la nomenclature proposée par le ministère:
- perte de linéaire de cours d’eau,
- perte de linéaire de berges naturelles,
- modification des écoulements souterrains, des échanges nappe/cours d’eau,
- déconnexion du chenal principal avec ses annexes hydrauliques, rupture ou altération de la continuité écologique latérale,
- modification ou diminution localisée de la capacité d'accueil du cours d'eau pour la flore et la faune : réduction de la richesse spécifique, modification de la diversité des peuplements et/ou baisse de la productivité.
Lors des préparations de dossier, enquêtes publiques et contentieux judiciaires concernant des effacements d'ouvrages hydrauliques, nous appelons les riverains ou leurs associations à opposer ces points au pétitionnaire qui détruit ou assèche des plans d'eau et des biefs avec toute la perte de productivité biologique que cela implique.
Comment procéder ?
- Les éléments en eau (et leur berge) appelés à disparaître sont photographiés et cartographiés par les riverains, avec autant que possible documentation de la biodiversité observée (arbres et plantes, insectes, amphibiens, oiseaux, poissons, etc.).
- Un rapport est publié avec une demande formelle soit de respect des milieux en place, soit de description des compensations à hauteur de ce qui sera détruit, sous forme de courrier à adresser à 4 interlocuteurs : service instructeur DDT-M (courrier recommandé); service instructeur AFB (courrier simple) ; pétitionnaire maître d'ouvrage du chantier (syndicat, parc, fédé pêche, etc.) (courrier recommandé) ; élus locaux sur le territoire du chantier (courrier simple).
Si l'administration et le pétitionnaire se refusent à éviter ou compenser les destructions opérées, le cas doit être porté en justice : requête en annulation de l'arrêté préfectoral autorisant les travaux malgré l'absence de compensation. Contacter notre association pour des modèles de contentieux.
Référence à citer : Direction de l'eau et de la biodiversité (MTES) (2017), Mesures compensatoires cours d’eau, réglementation, doctrine, 28 p. Egalement disponible à ce lien.
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