Un lecteur nous adresse cet extrait de l'ouvrage de Paul Delsalle, maître de conférences en histoire moderne et archivistique aux universités de Mulhouse et Besançon, consacré à la vie des paysans de Haute Saône au XVIe et XVIIe siècles. Le travail sur les archives révèle la richesse des rivières en poissons, convoitée les jours maigres, à une époque où moulins et étangs s'étaient déjà installés sur de nombreux bassins versants. On observe que les poissons d'eaux lentes s'y mêlent déjà aux poissons d'eaux vives.
Les jours maigres étant nombreux, nous ne pouvons pas négliger la consommation de poissons. Heureusement, les rivières étaient alors très poissonneuses, selon de nombreux témoignages contemporains. S'y ajoutaient les étangs et les viviers. Les paysans disposaient encore assez souvent du droit de pêche. C'est ainsi que les habitants de Breurey-lès-Faverney et ceux de Mersuay s'accordaient en 1572 au sujet de la pêche dans la Lanterne. Les fermiers de la grange de Miéüllers à Cendrecourt pouvaient pratiquer "la pêche à la trouble [=au filet] à pied dans la rivière de Saône". Dans l'Ognon, on pêchait assez librement des perches, des carpes, des brochets, des brèmes, des barbeaux, des lamproies et des anguilles. Les étangs fournissaient des carpes, des "carpailles", des brochets, des tanches et bien d'autres poissons. Dans la Saône, on capturait des brochets, des lottes, des truites, des ombres, des carpes, des perches, des anguilles, des tanches, des "menuses" (poissons de petite taille, menu fretin), mais encore "des poissons blancs de toute espèce", des écrevisses et des grenouilles. Dans les différentes rivières ou ruisseaux de la région, on pouvait se procurer aussi des poissons aux noms plus ou moins indigènes : rousses, bouilles, rougeuil (rouget?), abletz (ablettes), daressons, seffes, greffons ou gouvion, (gouions), verons (vairons), bavoux, mostelles (motelles ou moutelles, lottes de rivière, minuscules poissons à chair grasse), filleittes, barbeletz (barbeaux?), lamproies de rivière dites aussi sept-oeils, et bien d'autres. Les garçons et les filles chargés de surveiller le bétail passaient leur temps à pourchasser les grenouilles, les moules de rivière, les escargots, et toutes les autres bestioles comestibles afin de remplir leur panier pour améliorer l'ordinaire.
Source : Delsalle Paul (2016), Des paysans au temps de la poule au pot, sur les plateaux de la haute Saône vers 1580-1635, éditions Franche-Bourgogne, 371 p.-XII p. de pl.
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