La règlementation Restore Nature, inspirée à la commission européenne par les lobbies et experts militant pour le retour à la rivière sauvage, prévoit comme seule option sur les cours d’eau concernés la destruction des ouvrages hydrauliques. Ce choix radical a pourtant déjà mené à des conflits, contentieux et condamnations en France, pays qui a tenté d’en faire l’essentiel de sa politique publique des ouvrages en 2010, avant d’abandonner. Nous appelons les députés européens à mener leur travail politique d’analyse critique des positions bien trop radicales de la commission sur ce sujet, d’autant qu’elles viennent d’être aggravées et non améliorées par le rapporteur environnement du Parlement. L’eau et l’énergie sont des dimensions critiques pour les populations européennes , elles vont le devenir de plus en plus au cours de ce siècle. L'avenir des ouvrages hydrauliques se réfléchit à la lumière de ces enjeux. Quant à la négation de six millénaires de relations humaines aux rivières au nom d’une vision théorique de la nature déshumanisée, c’est un choix idéologique n’ayant certainement pas vocation à inspirer une politique publique à échelle du continent. Une réécriture plus démocratique, plus intelligente et plus inclusive du texte est indispensable.
- L’Europe affrontera des besoins critiques en eau et en énergie, qui doivent avoir primauté normative non ambigüe sur les options de «ré-ensauvagement» des milieux aquatiques.
- Les tentatives d’imposer aux populations locales des solutions uniques décidées par des technocraties lointaines échouent partout, elles se traduisent par des injustices territoriales et par une régression de la perception de l’écologie.
- Les rivières européennes sont des réalités anthropisées depuis 6 millénaires, tandis que le réchauffement climatique est en train de changer les conditions de tous les systèmes aquatiques. Il est donc simpliste et même aberrant de faire encore croire aux citoyens qu’une «nature» se «restaure» dans un état antérieur sous prétexte que tel ouvrage est ou non présent.
- L’obsession du retour à une nature pré-humaine peut aussi se traduire par la destruction d’habitats anthropiques d’intérêt, cette issue doit donc être clairement traitée par le droit en exigeant des inventaires préalables complets de biodiversité sur site, en interdisant des perturbations ne correspondant à aucun intérêt public réel, ou ayant des alternatives meilleures.
- Il est tout à fait possible de préférer des aménagements de tronçons de rivière en vue d’avoir une haute «naturalité» (entendue comme faible impact humain), mais un tel choix doit relever des préférences locales au cas par cas, avec justification forte et adhésion réelle. Un tel choix constitue par ailleurs lui aussi et en dernier ressort un aménagement anthropique (la création d’un certain type de paysage fluvial désiré par des riverains). Opposer l’humain et la nature n’a pas ici de sens, ce sont toujours des relations nature-culture qui se décident et se déploient.
- La technocratie européenne doit écouter l'ensemble des parties prenantes concernées dans la construction de ses décisions, et non une sélection d'acteurs confortant des choix administratifs sectoriels. Elle doit aussi respecter le principe de subsidiarité et ne pas imposer aux Etats et aux communautés des choix prédéfinis là où il existe des alternatives.
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