En étudiant 18 cours d'eau du nord de l'Angleterre avec des données de long terme, trois chercheurs observent que l'écrevisse signal est associée à des variations significatives des poissons benthiques, des salmonidés et des invertébrés. Une espèce de chabot semble avoir totalement disparu des rivières concernées par l'invasion. L'étude menée avec des cas contrôles montre que ni les variations d'habitat ni les évolutions de pollution n'expliquent les effets observés, qui sont donc rapportés à la présence ou à l'absence de l'espèce invasive. Les premières années d'invasion touchent les invertébrés, surtout les moins mobiles, puis un effet sur les poissons est observé après 7-8 ans. Les espèces invasives ne sont pourtant pas intégrées dans la mise en oeuvre de la directive cadre sur l'eau comme facteur causal d'évolution des marqueurs biologiques des cours d'eau.
29/01/2021
Les écrevisses signal changent rapidement les écosystèmes d'eau douce (Galib et al 2021)
26/01/2021
La destruction des ouvrages et l'écologie du sauvage, un hold-up démocratique sur les rivières
L'écologie est à la mode... mais de quelle écologie parle-t-on au juste? Dans une tribune publiée sur le site The Conversation, le chercheur Raphaël Mathevet souligne qu'il existe aujourd'hui des représentations différentes de la nature, donc des aspirations et des horizons différents pour l'écologie. Il discerne 4 écologies possibles pour l'Anthropocène. Son analyse permet de comprendre que la destruction des ouvrages hydrauliques avec idéal de libre écoulement de la rivière non entravée par les humains répond à une "écologie du sauvage". Petit problème : jamais les élus des citoyens au parlement n'ont validé une telle définition de l'écologie comme inspiration de la politique publique de la nature. Et ce sont des instances non élues qui ont instillé ces idées dans des textes normatifs opposables aux citoyens. Non sans attirer une réaction immédiate de la société, les riverains ne partageant pas tous ces vues, loin de là. Quand va-t-on avoir des débats démocratiques de fond sur les politiques de la nature?
24/01/2021
Mobilisez vos députés et sénateurs pour inscrire les moulins et barrages dans la loi Climat et résilience
Après les travaux de la Convention citoyenne pour le climat, les parlementaires vont examiner dès le mois prochain une loi "Climat et résilience". Or, dans le même temps, l'administration de l'eau en plein dérive manipule les élus sur la continuité soi-disant "apaisée", détruit des ouvrages hydro-électriques, entrave le ré-équipement des moulins, assèche des retenues et des biefs. Cette bureaucratie ne sert plus l'avenir du pays, mais une idéologie folle de la nature sauvage, en décalage complet de nos urgences et de nos attentes. Particuliers, associations, syndicats : nous demandons à tout le mouvement des ouvrages hydrauliques et de leurs patrimoines de saisir le député et le sénateur de leur circonscription afin de les sensibiliser à la nécessité d'inscrire dans la loi la promotion des moulins, étangs, lacs et canaux au service de la transition écologique.
- les retenues, plans d’eau, lacs, étangs, canaux biefs, apportent des services écosystémiques aujourd’hui indispensables. Les ouvrages assurent préservation de l’eau à l’étiage, régulation de crue, dépollution locale par épuration, réservoir de biodiversité, puits carbone, agrément paysager, énergie bas-carbone, alimentation des nappes et zones humides. Il en résulte que les hydrosystèmes d'origine humaine doivent être protégés par le droit de l'environnement, en particulier au vu de leur menace de destruction et assèchement.
- l'équipement hydro-électrique de moulins présents sur les cours d'eau jouit d'une forte popularité en particulier dans les communes rurales qui comportent souvent plusieurs sites potentiels et chez des particuliers pouvant développer de l’autoconsommation ou des contrats de petites injections à moins de 36 KVA. La recherche scientifique a montré l'existence de plusieurs dizaines de milliers de sites équipables en France, représentant l'équivalent d'une tranche nucléaire, ou de tout l'éclairage public du pays. Cette énergie bas-carbone et locale apporte une contribution non négligeable à la transition énergétique : elle doit être simplifiée, accélérée et encouragée par les pouvoirs publics, au lieu d'être freinée voire combattue comme aujourd'hui.
17/01/2021
Le climat change, la migration des poissons aussi (Legrand et al 2020)
Aloses, truites de mer, saumons, anguilles et lamproies marines commencent à modifier leurs périodes de migration en réponse aux signaux du changement climatique sur les régimes océaniques, la température et le débit des fleuves. Telle est la conclusion d'une équipe de chercheurs ayant étudié ces poissons en France, sur 40 points de mesure et pendant trois décennies. Les plans de gestion des migrateurs doivent donc intégrer ces évolutions en cours ainsi que les diverses hypothèses de réchauffement, qui va modifier le régime des cours d'eau français au cours de ce siècle.
16/01/2021
Controverse sur les étangs du Limousin, la réponse des scientifiques
Une association naturaliste a attaqué avec virulence des travaux universitaires qui avaient démontré qu'une zone humide naturelle peut évaporer autant ou davantage qu'un étang, contrairement aux idées reçues. Les chercheurs incriminés répondent.
Etang de la Tuillière, CC-SA 4.0
L'association Sources et rivières du Limousin avait publié en septembre dernier une vigoureuse attaque contre les étangs de sa région, accusés d'aggraver les sécheresses. Le texte comportait un certain nombre de critiques virulentes de travaux scientifiques menés à l'université d'Orléans par les équipes de Laurent Touchart et Pascal Bartout, notamment la thèse de M. Aldomany que nous avons recensée (voir aussi l'article d'étude sur l'évaporation des étangs Aldomany et al 2020).
Les chercheurs incriminés répondent aujourd'hui (lien pdf) :
Sur le fond du sujet, nous attendons que le bilan hydrologique des bassins versants soit fait sérieusement, ce à quoi s'attellent notamment les recherches de terrain de MM. Touchart, Bartout et Aldomany. Il faut pour cela que le limnosystème (l'ensemble des plans d'eau) fasse lui aussi l'objet de travaux d'étude, ce qui n'a pas été le cas à hauteur des besoins de connaissances. Alors que l'on ne compte plus les dépenses publiques (plus ou moins utiles) sur les seules rivières, comme si le demi-million de plans d'eau que comporte notre pays n'existait pas et n'avait pas un rôle dans les services écosystémiques. Pour ces raisons, le rapport d'étude sur l'effet cumulé des retenues commandité à l'Irstea (aujourd'hui Inrae) avait conclu au manque de mesures de terrain et à la nécessité d'en acquérir.
Comme trop souvent en France, le débat public sur l'eau, ses usages et ses ouvrages s'irrigue davantage de conjectures voire de postures et de slogans que de faits et de preuves.
Certains proclament que les "solutions fondées sur la nature" vont permettre de stocker l'eau dans les nappes et les sols, mais on ne voit pas tellement de mesures sur les quantités concernées (et la disponibilité de cette eau pour la société) ni de preuves de concept sur des chantiers témoins (où la nature comme la société y trouveraient leur compte, ce qui est le but des "solutions" répondant aussi à des attentes humaines). D'autres affirment que les retenues diminuent l'eau disponible, ce qui est passablement contre-intuitif, mais là encore de telles assertions sont fondées sur peu de données, souvent des méta-analyses internationales de réalités très différentes et non pas des analyses in situ. De telles analyses in situ ne donnent pas toujours un résultat brillant sur le régime de l'eau dans le cas de la suppression ou la fin d'activité des moulins et étangs (voire par exemple Maaß et Schüttrumpf 2019, Podgórski et Szatten 2020). Par ailleurs, il arrive que l'on oublie de vulgariser tout ce qui est réellement dit dans un travail — par exemple, Wan et al 2017 qui n'avaient pas montré un effet négatif des retenues en situation de changement climatique, mais seulement un effet négatif sur des zones très sèches ou surexploitées, alors que la bonne gestion des retenues pourrait effectivement atténuer les effets du réchauffement sur tous les autres bassins.
Il est donc nécessaire que ces questions hydrologiques et écologiques prenant aujourd'hui tant d'importance soient désormais l'objet en amont de démarches scientifiques pluridisciplinaires, rigoureuses, collectives, ouvertes, mais aussi en aval de débats sociaux et politiques sur la nature que nous voulons réellement pour ce 21e siècle. Car cette nature en France et en Europe est une co-construction de la société, pas une entité métaphysique qui aurait une réalité indépendante des actions et des choix des humains.
08/01/2021
La France échoue à assurer la qualité écologique et chimique de ses eaux
Les agences des grands bassins hydrographiques français s'apprêtent à adopter leur dernier programme d'action (SDAGE) avant la date-butoir de 2027 où la directive européenne sur l'eau de 2000 exigeait le bon état chimique et écologique de 100% des masses d'eau. Or, les états des lieux des bassins publiés au cours de l'année 2020 révèlent un échec majeur : nous sommes entre 23% et 50% des cours d'eau et plans d'eau en bon état écologique. Avec même des régressions par rapport à 5 ans plus tôt, car l'Europe s'est montrée plus exigeante sur la prise en compte de certains polluants. Pourquoi en sommes-nous là?
"Face à ces enjeux communautaires [de la directive eau 2000], et malgré le dispositif mis en place par les lois sur l'eau ou la pêche du 16 décembre 1964, du 29 juin 1984 et du 3 janvier 1992, force est de constater que la situation en France n'est pas entièrement satisfaisante, même si par certains de ses aspects la directive cadre sur l'eau est inspirée en partie du modèle français.En effet, la qualité des eaux n'atteint encore pas le bon état requis par la directive du fait des pollutions ponctuelles ou surtout diffuses insuffisamment maîtrisées, qui compromettent la préservation des ressources en eau destinées à l'alimentation humaine et les activités liées à l'eau ainsi que l'atteinte du bon état écologique des milieux.L'objectif de bon état écologique des eaux n'est atteint actuellement que sur environ la moitié des points de suivi de la qualité des eaux superficielle"
- En Adour-Garonne, l'état écologique des cours d'eau et plans d'eau est bon ou très bon dans 50% des cas.
- En Artois-Picardie, l'état écologique des cours d'eau et plan d'eau est bon ou très bon dans 23% des cas.
- En Loire-Bretagne, l'état écologique des cours d'eau et plans d'eau est bon ou très bon dans 24% des cas.
- En Rhin-Meuse, l'état écologique des cours d'eau et plan d'eau est bon ou très bon dans 29% des cas.
- En Rhône Méditerranée, l'état écologique des cours d'eau et plan d'eau est bon ou très bon dans 48% des cas.
- En Seine-Normandie, l'état écologique des cours d'eau et plans d'eau est bon ou très bon dans 32% des cas.
06/01/2021
Les castors créent des habitats lentiques et modifient les peuplements de la rivière (Wojton et Kukuła 2020)
Deux chercheurs analysant sept retenues de barrages de castor sur des rivières de plaine montrent que les ouvrages des rongeurs modifient les peuplements d'insectes et autres invertébrés, grâce à la création de zones lentiques. C'est exactement ce qui est reproché en France aux ouvrages des humains. Comme si la rivière ne devait être qu'un écoulement rapide et sans obstacle de la source à la mer...
02/01/2021
250 ans d'évolution des poissons migrateurs en France (Merg et al 2020)
Des chercheurs français livrent une intéressante analyse de l'évolution de 1750 à nos jours de huit taxons de poissons grands migrateurs, identifiés en archives sur 555 points du territoire. Sur 45% des sites, les poissons diadromes ont disparu en deux siècles et demi. Leur zone d'expansion s'est réduite de 18% à 100% selon les espèces. Les auteurs de l'étude pointent une multitude de causes, parmi lesquelles les obstacles physiques à la migration formés par les ouvrages hydrauliques qui barrent transversalement la rivière. Leur modèle montre que la hauteur des ouvrages est le premier prédicteur de blocage des bassins versants aux migrateurs, ainsi que leur densité sur la distance entre la mer et les sites de frai. Cela explique aussi que les migrateurs étaient répandus en France en 1750 alors qu'il existait de l'ordre de 100 000 moulins à la fin de l'Ancien régime — mais des moulins à ouvrages de dimensions modestes et à gestion active. Pour autant, les chercheurs soulignent que la restauration de continuité écologique ne peut prendre les références passées comme critère des choix futurs: outre que les rivières ont changé au fil des siècles et que les bénéfices pour les migrateurs sont associés à des coûts pour la société, le changement climatique va modifier le régime des cours d'eau.
"La présente étude a confirmé que la fragmentation des rivières (c'est-à-dire de la mer au site considéré) est une menace majeure pour les poissons diadromes. Dans notre modèle, les statistiques et la courbe de réponse associée à la hauteur maximale des barrières en aval suggèrent que la taille des barrières est le facteur qui exerce l'effet le plus fort et le plus net sur l'assemblage diadrome, conduisant à un impact majeur et systématique lorsque les barrages dépassent une dizaine de mètres. La densité des barrières contribue également à la dégradation des assemblages diadromes mais semble avoir un effet plus diffus et modéré que la taille des barrières en aval. Il reflète l'effet cumulatif potentiel des barrières. L'effet cumulatif des obstacles successifs, tels que les petits déversoirs ou les systèmes d'écluse, qui ne sont pas physiquement difficiles à franchir individuellement, peut causer des problèmes considérables aux poissons (par exemple, des retards, une réduction du succès de la migration, des blessures). Selon son taux de francissement, chaque barrière réduit la fraction de la communauté qui peut poursuivre sa migration. Même si la proportion de poissons coincés devant un obstacle donnée est faible, la succession d'obstacles à franchir peut conduire à une réduction drastique du nombre de poissons en fin de parcours."
"Les liens étroits observés entre la perte de poissons diadromes et la hauteur et la densité des barrières suggèrent que la construction de barrages a eu une contribution significative au déclin à long terme des poissons diadromes. Cependant, ce résultat soulève un certain paradoxe dans la mesure où une grande partie des barrières référencées dans la base de données ROE actuelle existaient probablement déjà lors des premières observations historiques de taxons diadromes. En Europe occidentale et particulièrement en France, l'aménagement des cours d'eau est vieux de plusieurs siècles et s'est considérablement développé dans la seconde moitié du Moyen Âge avec l'installation généralisée de moulins à eau sur la plupart des petits et moyens cours d'eau. Le nombre de moulins a été estimé à 100 000 le long des fleuves français au XIIIe siècle. Ce nombre est resté pratiquement inchangé jusqu'en 1809, date à laquelle leur utilisation a progressivement cessé au cours du 19e siècle. L'arrêt des activités de meunerie n'a cependant pas impliqué la disparition systématique des obstacles associés. La plupart des déversoirs et des barrages à faible hauteur actuels sont des héritages de constructions médiévales (voir par exemple Rouillard et al. pour le bassin de la Seine). Néanmoins, il semblerait que les changements induits au fil du temps concernant (1) la gestion de ces installations (par exemple l'arrêt de l'ouverture régulière des vannes auparavant nécessaires au bon fonctionnement et l'entretien des usines) et (2) leur modernisation (par exemple le renforcement, élévation des hauteurs, changement de conception) ont rendu leur passage plus difficile pour les poissons. Cependant, suite aux progrès techniques, la plupart des barrages de taille moyenne à grande ont été construits plus tard; c'est-à-dire (1) au cours du XIXe siècle avec le développement de la navigation intérieure et l'expansion industrielle, et (2) après la Seconde Guerre mondiale en conséquence du développement économique; par exemple, en France, 86% des grands barrages existants (soit égaux ou supérieurs à 15 m) ont été mis en service après 1930. Ainsi, la plupart des barrages moyens à grands, qui ont le plus d'impact sur les poissons diadromes selon nos résultats, ont été construits après la période au cours de laquelle la distribution historique des poissons diadromes a été décrite."
Extrait de Merg et al 2020, art cit.
"Globalement, les résultats des différents scénarios suggèrent qu'une amélioration à grande échelle des poissons diadromes (ex: assemblage sur tout le territoire français) nécessitera nécessairement des mesures à grande échelle pour améliorer la continuité fluviale sans les limiter aux plus grands barrages, mais aussi en tenant compte des plus petits obstacles dont l'effet cumulatif semble potentiellement très important. Les scénarios que nous avons mis en œuvre sont basés sur la suppression d'un nombre considérable de barrières mais sans tenir compte de leur coût et efficacité et de leurs éventuelles conséquences secondaires négatives (ex: perte de valeur patrimoniale et culturelle, impact économique et commercial, déstabilisation morphologique). Des approches plus raffinées examinant le rapport coût / efficacité pourraient permettre d'identifier des scénarios optimisés, adaptés à chaque bassin et limitant le nombre de barrages à supprimer tout en conservant une bonne efficacité de la récupération des espèces diadromes."
"l'utilisation de l'occurrence passée des espèces pour établir des repères pour la restauration future soulève certaines questions, dans le contexte du changement climatique en cours. Les approches prospectives prédisent des changements significatifs dans les aires de répartition continentales des poissons diadromes en raison du réchauffement et des changements de régime hydrologique [105]. Ainsi, les bassins désormais habités par certaines espèces, en particulier les eaux froides, pourraient leur devenir inadaptés d'ici quelques décennies. Dans ce contexte et pour des restaurations efficaces et à long terme, les occurrences historiques d'espèces diadromes doivent être considérées comme un indicateur de rétablissement potentiel et non comme une liste fixe d'espèces définissant strictement les futurs objectifs de restauration."
- les altérations morphologiques autres que les obstacles transversaux sont "à dire d'experts", ce qui est potentiellement faible (entre 1750 et nos jours, la morphologie des berges et des écoulements, notamment latéraux, a considérablement changé, même dans l'état présent il n'est pas évident d'attribuer des degrés d'artificalisation ni de périodiser ces changements, qui se sont accélérés entre 1950 et 1980 : recalibrage, curage, drainage, suppression d'annexes, colmatage de lits);
- les données de qualité chimique (issues de la base Naïades) sont insuffisantes pour décrire la réalité des pollutions des rivières françaises, les relevés les plus fréquents (pour la DCE) ne concernant qu'une petite fraction des eutrophiants et polluants susceptibles d'affecter les espèces et leur réseau trophique;
- concernant les obstacles, les descripteurs de la base ROE sont insuffisamment renseignés. Il manque le plus souvent la hauteur exacte de chute à différents débits, la description de franchissabilité latérale, l'âge de construction (ou reconstruction) des chaussées, seuils barrages, buses et autres.
- la pression de pêche et braconnage est absente (pêche en rivière ou en estuaire et littoral), mais les auteurs reconnaissent ce point : "Étant donné que les données sur les captures fluviales et marines peuvent refléter uniquement l'état du stock et ne sont pas une preuve de surexploitation, tester l'implication des pêcheries dans le déclin des poissons diadromes est une tâche délicate. Pour cette raison et en raison d'un manque de données, nous n'avons pas inclus ces informations dans le modèle. Cependant, même si nous n'avons connaissance d'aucun cas dans lequel la surpêche a conduit directement à l'extinction des espèces, la surpêche peut avoir contribué au déclin de certaines populations diadromes. A titre d'exemple, en France, les esturgeons européens ont été massivement capturés pour le caviar jusqu'à l'interdiction de pêche en 1982, ce qui a certainement participé à la quasi-extinction de cette espèce."
- si leur déclin est probablement millénaire, les grands migrateurs diadromes étaient encore présents sur nombre de bassins et jusqu'aux sources au milieu du 18e siècle, alors que les moulins étaient déjà 100 000 à cette époque, sans compter les étangs. Cela confirme que les ouvrages d'Ancien Régime et leur gestion permettaient la circulation des poissons;
- la hauteur reste le premier prédicteur de blocage à la recolonisation des migrateurs, sur nombre de bassins la présence d'ouvrages non franchissables à tout débit de la rivière limitera le retour sur les têtes de bassin. La continuité écologique dogmatique consistant à détruire tout ouvrage sur des bassins versants est à réviser, car elle coûte en argent public et a d'autres effets négatifs sur la ressource en eau;
- la conservation des grands migrateurs doit être repensée à un niveau raisonnable et non maximaliste, d'autant que les besoins de protection des milieux aquatiques et humides sont loin de se résumer à quelques espèces de poissons, même si celles-ci sont appréciés des pêcheurs. Outre les pollutions nombreuses affectant la qualité de l'eau, les ruptures de continuité latérale et l'incision des lits ont probablement eu des effets nettement plus importants sur la faune et la flore des cours d'eau et des rives que les ruptures de continuité longitudinale présentes depuis des siècles sous influence humaine. Pour ces dernières, il faut attendre des retours d'expérience sur les nouveaux dispositifs de franchissement des années 2010 (rampes rustiques, rivières de contournement) afin de vérifier que leur efficacité est supérieure à celle des anciennes passes à poissons du 20e siècle. Sur nombre de moulins en zones rurales, le retour à une gestion avisée peut déjà obtenir des résultats.